( 2 juin, 2023 )

Que diable Darmanin a-t-il en tête ?

 

Lu sur « Je Suis Français »

 

Le ministre de l’Intérieur a fait parvenir à tous les préfets de France une lettre d’instructions par laquelle il les enjoignait d’interdire systématiquement toutes les manifestations de l’ultra-droite. Dans ce document, il justifie cette interdiction par le « risque de slogans ou propos de nature à mettre en cause la cohésion nationale ou les principes consacrés par la Déclaration des droits de l’homme » : l’« apologie de la collaboration », ou encore l’« amalgame entre immigration et islamisme » sont cités en exemple. Enfin, le ministre met aussi en avant le « risque que ne soient commises des infractions pénales », notamment l’incitation à la haine ou à la discrimination. Il déclare de même à la Chambre des députés « J’ai donné comme instruction aux préfets » lorsque « tout militant d’ultra-droite ou d’extrême droite ou toute association ou collectif, à Paris comme partout sur le territoire, déposera des [déclarations de] manifestations » qu’ils prennent « des arrêtés d’interdiction » Et il se réfère à la jurisprudence « identitaires- Dieudonné » et conclut, curieusement : « nous laissons au tribunal de trancher ». Que comprendre à ce salmigondis ? Et d’abord, quelle est la jurisprudence à laquelle se réfère le ministre ? Il s’agit de deux arrêts du Conseil d’État, statuant comme juge en appel des référés, en date du 9 janvier 2014, l’autre du 30 mai 2021. Par le premier (Dieudonné), le juge administratif déclare que :

Le préfet a pu, sans illégalité, procéder à l’interdiction du spectacle à raison de son contenu dès lors que ce dernier est connu et porte atteinte à la dignité de la personne humaine (..) risquant d’occasionner des propos pénalement répréhensibles et de nature à mettre en cause la cohésion nationale, (et donc entraînant) de graves atteintes au respect des valeurs et principes, notamment de dignité de la personne humaine, consacrés par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et par la tradition républicaine ;

– qu’il appartient en outre à l’autorité administrative de prendre les mesures de nature à éviter que des infractions pénales soient commises ; qu’ainsi, en se fondant sur les risques que le spectacle projeté représentait pour l’ordre public et sur la méconnaissance des principes au respect desquels il incombe aux autorités de l’État de veiller, le préfet de la Loire-Atlantique n’a pas commis, dans l’exercice de ses pouvoirs de police administrative, d’illégalité grave et manifeste.

Par le second, le même juge valide l’interdiction de « Génération identitaire », au motif que celle-ci, dans ses actions, désigne les étrangers à la vindicte publique. 

Ces deux arrêts, certes, ne sont pas anodins, dans la mesure où ils considèrent comme légitime une nouvelle atteinte à la liberté d’expression, mais surtout parce qu’ils permettent apparemment au ministre de relier abusivement une pitrerie corrosive et un combat politique objectif, celui de la lutte contre l’immigration de masse, dont il serait illégal de contester les bienfaits. Si cette jurisprudence devait être étendue, comme le suggère Darmanin, ce serait une révolution juridique sans précédent, dans la mesure où la loi pénale, restrictive par définition, pourrait sanctionner des délits éventuels, et surtout établir une nouvelle religion d’État, dont les dogmes, supérieurs à la loi, en seraient l’inspiration.

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Est-ce donc la pensée du ministre de l’Intérieur ? En fait, ses motivations sont différentes, et purement politiciennes. Il faut bien comprendre que, depuis la fin de l’Ancien Régime, un ministre de l’Intérieur (anciennement ministre de la Police) a comme mission principale, non pas la sécurité et la quiétude des administrés, mais la préparation des élections, afin de s’assurer que l’équipe ministérielle gardera le pouvoir.

En fait, c’est su de tous, le gouvernement Macron a connu une impopularité sans précédent, puisque toutes les tendances du prisme politique, centristes exceptés, se sont soulevées contre le Président à cause de la loi qu’il a imposée sur le régime des retraites. Le gouvernement de Macron peut bien se dire que les fluctuations de l’opinion sont des épiphénomènes de peu de conséquence, mais l’an prochain se dérouleront les élections européennes et il serait désastreux qu’elles permettent une progression trop marquée d’un parti en désaccord avec l’évolution immigrationniste et fédéraliste de l’Union européenne. Que faire donc ? Darmanin a choisi d’appuyer sur un levier vieux comme la république : la peur de « l’extrême Droite ». Les avantages sont patents, car elle a pour effet de diviser les ennemis du gouvernement. Pour cela, il a suffi à notre Rastignac d’autoriser la mascarade – au sens propre – du 9 mai, avec ses quatre cents figurants déguisés en croquemitaines qui se sont fait un plaisir de lui fournir des comparses gratuits et enthousiastes.

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À partir de là les interdictions tous azimuts qu’il a édictées reçurent l’approbation d’une Gauche toujours prête à justifier les privations de liberté si elles visent ses ennemis mythiques. Les effets ne se sont pas fait attendre : le 26 mai, le Figaro publiait une enquête d’opinion  indiquant « qu’Emmanuel Macron reprend des couleurs dans l’opinion : le président de la République y gagne, en un mois, 6 points d’avis favorables, – une poussée sondagière qui l’amène à 32% de popularité. Si le chef de l’État reste environ 10 points en dessous de l’étiage d’il y a un an, lors de sa réélection, il n’est plus à son plus bas niveau depuis la crise des gilets jaunes. À savoir, 26% de bonnes opinions parmi les sondés. » Finie l’union nationale contre la politique du gouvernement. Dans le même temps, Darmanin envoie des signaux en vue de rameuter la « Droite républicaine » pour le soutien à la loi déjà rédigée sur l’immigration, à la rage d’Élisabeth Borne, qui se sent assise sur un siège éjectable. Enfin, il peut espérer obtenir à force de censure et de répression une radicalisation des réprouvés qui lui permettrait d’améliorer la moisson de « complots » à livrer à la presse, limitée depuis dix ans à des vantardises et des propos d’après-boire, afin de renvoyer dos-à-dos le terrorisme d’extrême-Droite et le terrorisme islamiste, le terrorisme de l’extrême Gauche n’étant pas censé exister.

1984

Dans cette affaire, l’Action Française a su tirer son épingle du jeu en esquivant l’interdiction de ses manifestations, grâce à l’habileté de ses avocats, et peut-être aussi parce qu’elle a été avertie avant les autres mouvements par un fonctionnaire courageux. Cela dit, il ne faut pas croire qu’elle échappera à toutes les persécutions. Le calcul du ministre de l’Intérieur est d’ailleurs en phase avec l’Union européenne qui vient de menacer de sanctions très lourdes le forum Twitter par la bouche de Thierry Breton s’il refusait de censurer les commentaires opposés aux versions officielles, dans tous les domaines. Car la question n’est pas ici la liberté d’expression mais la liberté de penser et le courage de se défendre, qui sont les conditions de toute renaissance. En effet, Darmanin et sa police de la pensée, malgré le prosaïsme de leurs motivations, ne veulent pas seulement empêcher une parole, mais une démarche de l’esprit. Quoiqu’on fasse, nous sommes et serons toujours des opposants à cette vision totalitaire imposée par l’autorité illégitime. Et nous sommes du côté d’Orwell et de son anarchisme tory, lorsqu’il prévoyait l’assomption sinistre des slogans : « La vérité c’est le mensonge, la Paix, c’est la guerre, la Liberté c’est l’esclavage, l’Ignorance, c’est la puissance ».

Pierre de Meuse

( 1 juin, 2023 )

François Mitterrand et Vladimir Poutine : deux visions contradictoires de l’avenir de l’Afrique

 

Communiqué de l’AFRIQUE RÉELLE

 

1990, dans son fameux discours prononcé à La Baule lors du 16° sommet franco-africain, François Mitterrand  déclara que c’était par déficit de démocratie que le continent ne parvenait pas à se « développer ». En conséquence de quoi, il conditionna désormais l’aide de la France à l’introduction du multipartisme.
Le résultat fut que, dans toute l’Afrique francophone, la chute du système de parti unique provoqua une cascade de crises et de guerres, le multipartisme y exacerbant l’ethnisme et le tribalisme jusque-là contenus et canalisés dans le parti unique. Avec pour conséquence le triomphe électoral des ethnies les plus nombreuses, ce que j’ai baptisé il y a plus de trois décennies d’ « ethno-mathématique électorale ».

 

L’échec fut donc total car le postulat français qui était que les élections allaient permettre de dégager un consensus « national » entre les factions ethno-politiques ne fut pas vérifié. En effet, non seulement la démocratie a échoué à régler les conflits africains, mais plus encore elle les a nourris. Trois exemples :

 

1) Au Sahel, comme ils sont minoritaires, les nordistes qui sont assurés de perdre les élections sont donc exclus du pouvoir par les urnes. Pour eux, la « solution » électorale n’est donc qu’une farce puisqu’elle ne fait que confirmer à chaque scrutin les pourcentages ethniques, donc leur subordination démocratique aux sudistes (voir mon livre Histoire du Sahel des origines à nos jours).

 

2) Au Rwanda où les Tutsi forment 10% de la population et les Hutu 90%, sous la pression de la France, le président hutu Habyarimana fut contraint d’accepter le multipartisme.  Or, ce système fit remonter au grand jour les profondes fractures de la société rwandaises jusque-là engerbées au sein du parti unique. Le résultat fut une atroce guerre civile suivie du génocide de 1994 à l’issue duquel les Tutsi du général Kagamé qui n’étaient pourtant toujours que 10% de la population, reprirent par les armes un pouvoir perdu par les urnes trois décennies auparavant. Ici, la démocratie a donc débouché sur le chaos, puis sur un génocide (voir mon livre Rwanda, un génocide en questionset finalement sur la déstabilisation de toute la région des Grands Lacs et du Kivu .

 

3) En Libye, après y avoir provoqué l’anarchie, la France, ses alliés de l’Otan et ses partenaires de l’UE ont prétendu reconstruire le pays à partir d’un préalable électoral. Or, ce dernier est  inapplicable car il se heurte de front au système politico-tribal, les tribus libyennes ayant en effet leurs propres règles internes de fonctionnement qui ne coïncident pas avec la démocratie occidentale individualiste fondée sur le « One man, one vote »(Voir mon livre Histoire de la Libye des origines à nos jours).

 

La Russie de Vladimir Poutine a très exactement pris le contre-pied du « diktat » démocratique de François Mitterrand. A la différence du président français, elle considère en effet, et tout au contraire, que la cause des blocages de l’Afrique n’est pas le manque de démocratie, mais son instabilité politique…Une instabilité largement provoquée par cette même démocratie…

 

Aujourd’hui, de plus en plus nombreux sont les pays africains qui font la même analyse. Voilà les raisons de l’éviction de la France, un phénomène qui s’inscrit dans le cadre du grand basculement en cours et que les dirigeant français, englués dans leurs concepts universalistes n’ont pas vu venir. En Afrique, comme d’ailleurs un peu partout dans le monde, nous assistons en effet à la fois à la fin d’un cycle, et à un changement de paradigme.

Bernard LUGAN

( 1 juin, 2023 )

LE COUP DE POING DE PÉRONCEL-HUGOZ CONTRE THOMAS PIKETTY

 

 

Lu sur « Je Suis Français »

 

 

Si vous écoutez les radios françaises politiquement correctes telles France-Inter, France culture, France-info ou d’autres, il y a de fortes chances (ou plutôt de forts risques…) que vous captiez une voix masculine,  courroucée ou grondeuse, s’élevant contre « le creusement des inégalités » en France, beaucoup plus rarement aux États-Unis d’Amérique ou, pourtant, les écarts entre les classes sociales sont infiniment plus marqués que sur le vieux continent…

Oui, mais voilà, la voix plaintive ou coléreuse que vous aurez entendue est sans doute celle de l’économiste vedette Thomas Piketty, tant il pérore souvent sur les ondes, et ce monsieur appartient évidemment à notre gauche américanisée (notre droite est hélas logée à quasi même enseigne…) et l’air de rien bien sûr elle ménage toujours ses maitres…

Donc les coups, les plus gros en tout cas, pleuvent le plus souvent contre la malheureuse France, qui est pourtant, de notoriété internationale depuis 5o ans au moins – mais cela M. Piketty ne le rappelle pas – l’Etat de la planète qui redistribue la plus forte proportion des richesses nationales, et celui aussi, vous le savez, où les impôts divers et variés sont les plus lourds au monde…

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A entendre notre égalisateur médiatique, ces inégalités sociales françaises l’encolèrent,  le font enrager, le chagrinent mais très curieusement notre économiste-idéologue, fils d’un couple trotskyste, rayon Lutte ouvrière selon Wikipédia, ne nous dit jamais qu’il est issu en fait  d’une  opulente famille italienne, les Picchetto (devenue Piketty), venue en France sous louis XVIII et qui, sous Louis-Philippe et Napoléon III, s’enrichit grâce à son labeur et à la dynamique politique industrielle de la France du XIXème siècle. En effet Guizot avait dit : « enrichissez-vous par le travail et par l’épargne ! », phrase dont les esprits mal intentionnés ne citent que les deux premiers mots évidemment…

Piketty se tient naturellement « près du peuple » et en démagogue classique il clame bien sûr que l’Etat doit « faire payer plus les riches », feignant d’ignorer que ce sont surtout les détenteurs du capital qui créent des emplois, et l’ une des rares mesures macronistes intelligentes fut de supprimer l’impôt confiscatoire sur la fortune. M. Piketty appartient hélas a cette engeance égalitariste si française, dénoncée comme un danger social par Alexis de Tocqueville dès la monarchie de Juillet et qui est devenue de nos jours une obsession nationale. Rappelons à tout hasard que l’envie reste un péché capital même sous un pape gauchiste…

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Nos idéologues pikettystes refusent de voir ce que dit le simple bon sens,  à savoir que si demain on partageait en parts égales le gâteau national français, en moins d’un lustre, sans doute, il y aurait derechef des riches, des moyens et des pauvres dans notre hexagone. Piketty et ses pareils, par pure idéologie gaucharde, restent sourds et aveugles à nos raisons. Ils préfèrent se consacrer à nous fourguer leurs écrits tout fumants de fausse indignation  devant ce qu’ils nomment « le terrible creusement des inégalités ». Et rappelons-nous, au cas où le virus égalitariste viendrait un jour de malheur à s’imposer dans le cher et vieux pays, ce que disait le grand moraliste Nicolas Boileau : « l’ennui naquit un jour de l’uniformité ».

( 30 mai, 2023 )

Le simulacre de l’action ou le syndrome d’une trahison

 

 

 

Lorsque le dernier roi maure de Grenade – le jeune Boabdil – dut quitter la ville andalouse que les Rois Catholiques venaient de reconquérir, il s’arrêta au sommet du col par où passait la route de l’exil – col encore appelé aujourd’hui Suspiro del moro – il contempla une dernière fois Grenade, ses palais et ses jardins, et dans le lointain les hauts sommets enneigés de la Sierra Nevada, le panorama tout entier que peindrait Le Greco, et il pleura. Sa mère lui dit : « ne pleure pas comme une femme ce que tu n’as pas su défendre comme un homme ».

C’est Chateaubriand qui nous conte la scène dans son dernier Abencerage. Un livre que nous devrions lire ou relire car il nous enseigne le sort qui attend les rois et les peuples qui refusent de se défendre autrement que par des mots et par des pleurs, se laissent aller à toutes les mollesses, toutes les compromissions, toutes les soumissions et ont les conséquences. Tout ce que méprisait la mère du jeune roi maure – dont nous pourrions sans peine reconnaître les traits en tels ou tels de nos dirigeants ou censés l’être.

Quand les hôpitaux se remplissent de malades ou qu’un membre du personnel soignant se fait assassiner, que font-ils ? Il se rendent sur place, visitent les services, déambulent dans les couloirs, congratulent les soignants, et font des déclarations à la sortie. Président, Premier ministre, ministres concernés emplissent ainsi les écrans des chaînes d’information en continu qui s’en repaissent, en saoulent les citoyens et en font leurs choux-gras, en termes d’audience et de profits. Ainsi fonctionne ce Régime. Celui que De Gaulle appelait le Système. Qu’il n’a pas, hélas, aboli.

On ne sait ni ne peut, au fond grand-chose dans le cas d’une pandémie. Mais quand on égorge nos citoyens, nos policiers, nos enseignants, nos prêtres, quand de nouveaux venus insultent la France, maudissent son Histoire, ses gloires, sa langue et ses mœurs quand ils veulent imposer les leurs, qu’ils ont bien mieux conservées que nous les nôtres, quand nos adversaires sont identifiables, connus, repérés, fichés, etc., que fait-on ? Dans l’urgence de l’affrontement, en général, les policiers les tuent et c’est justice. Mais que font nos gouvernants, que faisons-nous, nous tous ? Comme d’habitude. La même chose.

Comme chacun sait, un Tunisien a tué le 23 avril 2021 à coups de couteau, une jeune femme policier. Le Premier ministre, le ministre de l’Intérieur, se sont rendus sur place, selon l’habitude. Ils ont déambulé, ont salué, ont fait des déclarations martiales. Mais qu’avaient-ils de substantiel, à dire ? Rien. Ils n’ont à proprement parler rien à dire. Pas l’ombre de l’esquisse de la grande politique que la situation migratoire et sécuritaire devrait indéniablement imposer.

Le Président de la République, au Tchad lors des funérailles d’Idriss Déby qui lui, au moins, semble être mort au combat pour défendre son semblant d’État, Emmanuel Macron, donc, a virilement déclaré pour la Xe fois : « Nous ne cèderons rien ».  Ce qui ne signifie rien, puisqu’on continuera, dès les mots envolés, à céder comme si de rien n’était. Le Chef de l’État avait d’ailleurs déclaré peu avant à la chaîne américaine CBS News :  « D’une certaine manière, nous devons déconstruire notre propre histoire. ». De quelle certaine manière ? On ne sait mais c’est, en tout cas, pour réaliser notre unité avec l’immigration.  

Il y a bien-sûr du Boabdil parmi nos dirigeants, parmi les policiers qui finissent toujours, après avoir tempêté, par accepter leur triste sort et, même, parmi les Français dont la réaction tarde encore à venir, malgré qu’ils en aient dans une proportion de 60 à 80% selon les moments et les sondages.

La mère du roi Boabdil avait raison de mépriser la mollesse aussi bien que les pleurs de son fils. Il ne faut pas s’étonner qu’une partie grandissante des diverses composantes de l’immigration méprise de même notre mollesse et nos pleurs, présents ou à venir.

Gérard Pol (rédacteur en chef de JSF)

( 29 mai, 2023 )

Le français comme il va

 

Lu sur « Je Suis Français »

 

La langue française se porte-t-elle « très bien », comme l’affirme le titre du court essai de Mmes Auger et Abeillé, Le français va très bien, merci (Gallimard), toutes deux linguistes et épaulées en la circonstance par une quinzaine de collaborateurs ? Ne se porte-telle « pas si bien » comme leur répond M. Pruvost, lui-même tout autant linguiste que ces dames, dans un texte intitulé « Le français ne va pas si bien, hélas » (Le Figaro, 24 mai), co-signé par une vingtaine d’écrivains, universitaires et académiciens ?

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On aurait presque pu se réjouir de la polémique, y voyant une manifestation de l’intérêt qu’a toujours suscité chez nous la langue et tout ce qui y touche de près ou de loin. Mais il ne faut pas se leurrer. Le petit brûlot des deux dames est le produit d’un engagement militant et idéologique évident. Elles revendiquent, certes, une démarche scientifique c’est-à-dire, concernant la langue,  descriptive et non prescriptive. Foin des normes et donc des jugements de valeur : tout ce qui existe a droit de cité ! Or, l’esprit scientifique qu’elles revendiquent leur sert plutôt de caution. On le comprend immédiatement, dès les tout premiers mots de la première de couverture, avec en guise de nom d’auteur : « LES LINGUISTES ATTERRÉES » – clin d’oeil évident à une écriture inclusive qui prétend, disent-elles, « dépasser le binarisme du genre grammatical ».

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Nous voici loin de l’objectivité scientifique : il ne s’agit plus de décrire la langue mais bien de la violenter en prétendant imposer les « normes » d’une toute petite minorité. Les premiers mots du texte lui-même, « Nous, linguistes… », vont dans le même sens. On aurait pu sourire de cette appropriation puérile et arrogante de leur discipline (alors qu’elles et leurs acolytes ne sont que des linguistes parmi d’autres, pas forcémet d’accord) et renvoyer les deux dames aux Femmes savantes de Molière (Armande : « Nul n’aura de l’esprit hors nous et nos amis », acte III, scène 2). Mais on sait aujourd’hui ce que cache ce sectarisme et de quoi le terrorisme intellectuel d’une certaine gauche radicale est l’annonce.

Pour l’instant, les coupeuses de têtes en sont au stade métaphorique. Leur cible prioritaire est l’Académie française : « elle bloque la langue au lieu de l’accompagner » (France Inter, matinale du 26 mai). Ainsi sont reprises contre elle les critiques les plus rebattues, les plus éculées, les plus stupides –  inutile d’y revenir.  Restons sur l’essentiel. Qu’est-ce qui permet d’affirmer que le français se porte très bien ? Réponse (France Inter) : « Le seul moyen d’abîmer une langue, c’est de ne pas la parler. Or, le français n’a jamais été autant parlé. » Argument purement quantitatif et qui ignore la langue écrite. Peu convaincant.

Le reste de leur argumentation qui repose pour l’essentiel sur le béaba de la linguistique peut dans un premier temps paraître aussi faible. Ce serait tomber dans le piège de leur présupposé : qui, sinon un éventuel adversaire, prisonnier du fantasme d’une langue qu’il idéalise, serait assez inculte pour nier qu’une langue est d’abord parlée, que la langue évolue dans toutes ses composantes et que l’on ne parle ni n’écrit plus aujourd’hui comme à l’époque classique, que des mots nouveaux d’origine étrangère y apparaissent régulièrement, que le français n’est plus seulement la langue des Français et qu’en existent en quelque sorte plusieurs variantes, que tout énoncé oral ou écrit est fortement tributaire de la situation de communication, etc. ? Ces évidences linguistiques leur permettent d’adopter un ton de donneuses de leçons, de discréditer par avance ceux qui ne seraient pas d’accord avec elles et d’éviter ainsi le débat de fond. 

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Quel est-il, ce débat ? Très simplement que si la langue est un outil social dont chacun doit apprendre à se servir, elle a aussi une dimension littéraire, culturelle, politique même – et peut donc faire l’objet de jugements de valeur, c’est-à-dire prescriptifs et au fond échapper aux seuls linguistes. Ainsi est-il dommageable pour la France (jugement de valeur) que M. Macron ait réuni deux cents patrons étrangers (Versailles, 15 mai) pour un sommet baptisé Choose France. En utilisant une formulation anglaise, le chef de l’État donne raison à ceux qui, contre l’avis des deux dames, jugent l’anglais envahissant – plus de deux tiers des Français, rappelons-le. N’eût-il pas été plus satisfaisant (jugement de valeur), y compris pour ses hôtes, de le baptiser « Choisir la France » ou  encore « Choisissez la France », avec en dessous, en plus petit et en italiques Choose France ?

On peut penser que la langue est le théâtre naturel d’un affrontement sain et constant entre des forces novatrices et des forces conservatrices. On a toutefois la désagréable impression que le court « essai » de Mmes Auger et Abeillé se situe au-delà de cet antagonisme, qu’il cherche plutôt à instiller les ferments d’une sorte de dissolution, peut-être faudrait-il dire déconstruction, de la langue. Ne désespérons pas : la langue française reste un être vivant qui mérite d’être défendue et illustrée encore et toujours.

Louis-Joseph Delanglade

( 26 mai, 2023 )

Emmanuel Macron s’inquiète d’un processus de décivilisation : à qui la faute ?

 

Lu sur « Boulevard Voltaire »

 

Mercredi, en Conseil des ministres, Emmanuel Macron, évoquant les violences, « quelle que soit la cause », qui frappent notre pays, a parlé d’un « processus de décivilisation ». Aussitôt, le chœur des pleureuses a donné de sa grosse voix. Pour se désoler de ces violences ? Penses-tu ! Pour reprocher au président de la République l’usage de ce mot nauséabond. Le fils de Savonarole et de Torquemada – entendez Edwy Plenel – et quelques-uns de ses épigones y ont vu le signe d’une dérive fasciste du chef de l’État : en 2011, Renaud Camus a publié chez Fayard un essai intitulé Décivilisation. Si ce n’est pas une preuve ! Quand le vitrier propose à Edwy Plenel de « remplacer » sa fenêtre, Edwy Plenel le met-il dehors en le traitant de facho ? D’autant que le néologisme n’est pas de Renaud Camus mais du sociologue allemand Norbert Elias, dont les parents sont morts en camp de concentration. La reductio ad hitlerum va être compliquée, même si, dans ce domaine, on sait Mediapart capable de grandes prouesses.

Le mot décivilisation – déjà utilisé notamment par David Lisnard et Bruno Retailleau bien avant Emmanuel Macron – est aussi fort que juste. Plus fort et plus juste qu’ensauvagement, car s’il désigne la même réalité, il décrit en plus une marche arrière : une régression morale. Le synonyme pourrait être un autre néologisme : « rensauvagement ». Retour à la loi du plus fort et du chacun pour soi. Foin de l’honneur et du respect. De la veuve et de l’orphelin. Les femmes et les enfants après. Ou jamais. Oui, c’était mieux avant. Quand nous étions civilisés.

Dans son œuvre « Sur le processus de civilisation », qui comprend deux volets – La Civilisation des mœurs (1975) et La Dynamique de l’Occident (1975), Norbert Elias explique que la civilisation occidentale s’est échafaudée autour de deux resserrements concomitants : la circonscription de la violence légitime autour d’un État solide, en mesure de la contenir et l’utiliser avec justice ; la contention des pulsions par un corset moral d’autocensure, s’exprimant par un formalisme fort dans les rapports sociaux. L’État est aujourd’hui faible, son monopole de la violence légitime est contesté, le corset moral a disparu, emporté par le reflux du christianisme et, par conséquent, de la conscience individuelle qu’il avait développée. Quant aux code de vie en société… les institutrices se font appeler Léa ou Stéphanie par les enfants (« Madame ? Mais je n’ai pas 80 ans ! »), les ministres écrivent des bouquins pornos, les Présidents font des galipettes dans l’herbe avec des youtubeurs et il n’y a guère que les croque-morts qui ne soient pas en jean, les mains dans les poches, lors des enterrements (avec peut-être le macchabée. Et encore).

Toutes les cases de Norbert Elias sont (dé)cochées. Nous sommes bien dans un processus de décivilisation. Emmanuel Macron a raison. Sauf que s’il n’en est pas le seul promoteur – la décivilisation s’inscrit dans le temps long -, il n’a rien fait pour en inverser la vapeur, bien au contraire : C’est McDonald’s qui déplorerait la montée de l’obésité. Le en même temps est une forme de schizophrénie. Le Président qui pointe la décivilisation est l’Emmanuel Macron du Puy du Fou, pas celui de Macfly et Carlito. Or, il est « l’un et l’autre », comme dit la chanson. Peu de chance, donc, puisqu’on parle de processus, que le processus de réflexion sur la décivilisation se poursuive : l’autre fera taire l’un.

« La nature d’une civilisation, c’est ce qui s’agrège autour d’une religion », écrivait André Malraux. Plus de religion, plus de civilisation. Ou bien, autre hypothèse, pas tout à fait absurde : autre religion, autre civilisation. La France est Perrette pleurant sur le lait renversé. Comment refaire pousser fleurs et fruits sur un arbre que l’on a soigneusement déraciné et que l’on ne veut surtout pas replanter ?

Gabrielle Cluzel

 Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste
( 26 mai, 2023 )

Xavier Driencourt, ambassadeur de France en Algérie pendant sept ans : « La France doit dénoncer unilatéralement le traité franco-algérien de 1968 »

 

Lu sur « Je Suis Français »

ACCORD DE 1968 SUR L’IMMIGRATION : « LES ALGERIENS RIENT DE NOTRE NAÏVETE »

 

Commentaire – Cet entretien avec Xavier Driencourt est paru dans Le Point du 24 mai. Xavier Driencourt en a d’ailleurs accordé un autre de même veine, au Figaro qui l’a publié dans son édition d’aujourd’hui. L’intérêt de cet entretien avec un diplomate qui connaît son sujet, n’échappera à personne. Le lecteur en tirera ses propres conclusions. Les nôtres sont qu’il faudrait une volonté politique ferme, du courage et qu’il faudrait être capable de faire face à l’ouverture d’une crise grave comme aux tempêtes qu’elle ne manquerait pas de soulever, pour suivre la voie évidemment difficile – mais sûrement nécessaire – que préconise Xavier Driencourt. Nous n’étonnerons pas si nous disons que nous ne croyons guère l’actuel Pouvoir français capable de s’y engager. La volonté ni le courage ne sont son fort. Il faudra sans-doute pour appliquer une telle politique, un autre Pouvoir, et peut-être un Pouvoir d’une autre nature, d’une autre trempe, doté des moyens d’action suffisants ; sans-doute faudra-t-il encore que la situation continue de s’aggraver jusqu’à ce gendre d’extrémité où le choix n’existe plus guère, sauf l’abandon, la soumission, l’extinction acceptée du cher et vieux pays.    Xavier Driencourt, ambassadeur de France en Algérie pendant sept ans :  « La France doit dénoncer unilatéralement le traité franco-algérien de 1968 » dans actualités Logo-Je-Suis-Français-Copie-Copie-1    

 

ENTRETIEN. Pour l’ancien ambassadeur Xavier Driencourt, la France doit risquer la crise diplomatique si elle veut assainir sa relation avec l’Algérie.

Ambassadeur de France en Algérie pendant sept ans, sous les quinquennats de Nicolas Sarkozy et d’Emmanuel Macron, Xavier Driencourt a rédigé une note, à la demande de la Fondapol, think tank libéral dirigé par Dominique Reynié, sur un pan méconnu du régime d’entrée et de séjour des étrangers en France : celui de l’accord franco-algérien de 1968. Alors que l’exécutif remet sur l’établi, après des mois d’atermoiements, son projet de loi sur l’immigration et l’intégration, le diplomate détaille ce régime particulier qui, selon lui, entrave toute possibilité de réforme.

Le Point : Les concertations sur le projet de loi Immigration vont démarrer. Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a prévenu qu’il ne toucherait pas à l’accord de 1968, qui régit les conditions d’entrée et de séjour des Algériens en France. En quoi est-ce une erreur ?

Xavier Driencourt : Cet accord a été signé peu après ceux d’Évian de 1962, alors que la population algérienne comptait une dizaine de millions d’habitants et que la France, en pleines Trente Glorieuses, recherchait une main-d’œuvre francophone. Il visait à faciliter l’installation des Algériens en France, en leur accordant un certain nombre d’avantages. Aujourd’hui, le contexte a changé, mais ces avantages subsistent ! Les Algériens ont droit à un certificat de résidence administrative pour tout visa de plus de trois mois, ils peuvent obtenir un titre de séjour au bout d’un an, le regroupement familial est facilité, les étudiants peuvent transformer leur visa d’étudiant en titre de séjour permanent. Ils échappent également aux règles favorisant l’intégration. Toutes ces dispositions sont exorbitantes au regard du droit commun, et on ne peut pas les changer car les traités internationaux, dans l’ordre juridique français, l’emportent sur les lois.

En clair, nos lois sur l’immigration ne concernent pas les Algériens ?

Elles ne les ont jamais concernés. En 1986, les visas ont été imposés à tous les pays, y compris aux Algériens, par le gouvernement de Jacques Chirac, mais nous n’avons jamais réussi à maîtriser cette immigration. Aujourd’hui, 12,6 % des immigrés vivant en France sont algériens, et plusieurs millions de personnes sur notre territoire sont d’origine algérienne. C’est pourquoi un projet de loi qui exclurait une dénonciation de l’accord de 1968, extrêmement protecteur, réduirait à presque rien les chances de maîtriser l’immigration.

Il a pourtant été possible, en 2021-2022, de réduire considérablement l’octroi de visas…

À la fin de mon premier passage à Alger en 2012, 213 000 visas étaient accordés. À mon retour en 2017, nous étions passés à 410 000 ! À Lille, à Marseille, à Lyon, les préfets alertaient sur les difficultés qu’ils rencontraient pour gérer un si grand nombre d’arrivées. J’ai donc demandé aux ministres de l’Intérieur et des Affaires étrangères, Gérard Collomb et Jean-Yves Le Drian, quelles étaient leurs instructions. Devais-je poursuivre la tendance et délivrer 800 000 visas ? Stabiliser à 410 000 ? Revenir au chiffre de 2012 ? Ils étaient embarrassés mais, soutenus par les préfets concernés et le ministère de l’Intérieur, nous avons mis en place à partir de fin 2017 un plan d’action qui a permis de réduire à 280 000 le nombre de visas délivrés, en un peu moins d’un an. Fin 2021, cette politique s’est étendue au Maroc et à la Tunisie qui, comme l’Algérie, refusaient d’émettre des laissez-passer consulaires, sans lesquels il n’est pas possible de réaliser les obligations de quitter le territoire français (les OQTF). Mais cela n’a pas marché, a-t-on dit, et six mois plus tard, on revenait à la normale.

Les gouvernements successifs ont eu conscience du problème, mais ont tous renoncé à dénoncer ces accords. Comment l’expliquez-vous ?

Ces accords font un peu figure d’acte fondateur des relations franco-algériennes, et sont symboliquement lourds. Dans la mentalité du peuple et des dirigeants algériens, il existe une sorte de « droit au visa », perçu comme la contrepartie de cent trente-deux ans de colonisation. La France est détestée, mais on exige de pouvoir s’y rendre librement. Nous n’en retirons pour notre part aucun avantage, ni sur le plan des laissez-passer consulaires, qui restent délivrés au compte-gouttes, ni sur le plan des visas octroyés aux Français souhaitant se rendre en Algérie – très limités, notamment pour les religieux ou les journalistes. Pourtant, tout serrage de vis dans l’octroi des visas déclenche de violentes crises.

Vous l’admettez : dénoncer l’accord de 1968 serait perçu, notamment par le président Abdelmadjid Tebboune, attendu en juin à Paris, comme une « déclaration de guerre ».

Ce serait une sorte de bombe atomique ! Il faut comprendre que ces visas sont un facteur de stabilité en Algérie. La société algérienne va mal. 70 % des 43 millions d’habitants ont moins de 30 ans, et cette jeunesse a peu de loisirs, pas d’emplois, pas de logements… Le Hirak, ce mouvement contestataire qui a entraîné la chute du président Bouteflika, a été durement réprimé par les militaires qui ont repris le pouvoir. La corruption existe. Face à un avenir qui paraît bouché, la jeunesse trouve des exutoires dans la religion, le sport, la violence… et les visas ! La perspective de rejoindre la France fait office de soupape. Nous ne sommes qu’à l’aube du problème, c’est pour cela qu’il faut agir.

Vous appelez clairement notre gouvernement à utiliser cette « bombe atomique » ?

Nos dirigeants hésitent, car ils redoutent une tempête diplomatique, mais aussi la pression des quelque 10 % de Français ayant, de près ou de loin, un lien avec l’Algérie – un lien charnel, intime. Mais ils font dans le même temps une erreur d’analyse en pensant que les embrassades, la contrition et les tapes dans le dos permettront d’amadouer leurs homologues algériens, qui reviendraient à une position plus raisonnable. Ceux qui tiennent le pouvoir à Alger ont été formés dans l’ex-URSS brejnévienne des années 1970, ils fonctionnent au rapport de force. Aujourd’hui, ils savent au fond que cet accord de 1968 n’a plus lieu d’être, et rient de notre naïveté.

À quoi ressemblerait le « jour d’après » ?

Inévitablement, l’Algérie rappellerait son ambassadeur à Paris et pourrait même rompre les relations diplomatiques. Elle pourrait également cesser toute délivrance de laissez-passer consulaires, donc refuser de reprendre ses clandestins, et expulser des Français d’Algérie. Ce serait une crise majeure, à la une de tous les journaux. Mais il faut braver cela, afin d’établir un rapport de force qui permette, lorsque les choses se calmeront, de redéfinir notre relation avec l’Algérie sur des bases plus saines, notamment sur la question migratoire, qui est l’un des aspects importants de notre relation. Il faut être lucide : il n’existe pas de manière apaisée d’atteindre cet objectif.

Gérald Darmanin a affirmé que la dénonciation de l’accord de 1968 aurait pour conséquence « de retourner à la situation ex ante, donc circulation libre et totale entre les deux territoires ». Se trompe-t-il ?

Il devrait approfondir le sujet. On peut toujours mettre fin à un traité international, comme le prévoit la convention de Vienne sur le droit des traités. Nous reviendrions alors au dispositif de droit commun, régi par le code de l’entrée et de séjour des étrangers en France. À nous et aux Algériens, ensuite, de renégocier un autre accord particulier, si l’on veut préserver une relation spéciale, mais adapté aux circonstances de 2023.

Retrouvez l’entretien sur lepoint.fr

( 25 mai, 2023 )

Miracle ! France Inter évoque le pèlerinage de Chartres (et ne ricane même pas)

 

Lu sur « Boulevard Voltaire »

 

À chacun son chemin de Damas. L’histoire retiendra (peut-être) que France Inter a été touché par la grâce au lendemain de l’Ascension.

La preuve ? La radio a évoqué le pèlerinage de Chartres. Celui qui s’ébranlera samedi matin de Saint-Sulpice – incendie de Notre-Dame oblige – pour rejoindre, lundi de Pentecôte, la cathédrale de Chartres. En parler est déjà un exploit, car depuis quarante ans, cette petite ville en mouvement – en nombre, c’est Bayeux ou Briançon qui se déplacerait à pied – intéresse fort peu les médias. Mais le plus incroyable, ahurissant, prodigieux, est que France Inter en a parlé de façon neutre, s’en tenant aux faits. Sans leurs tresser des couronnes de lauriers, mais sans se moquer, ricaner, cracher du fiel, faire de finaudes allusions aux prêtres pédophiles ni à la France de Vichy, tendre le micro à un obscur quidam assurant y avoir été traîné de force, enfant, il y a vingt ans par ses parents intégristes…  Non. Rien de tout cela. En interrogeant « vraiment » une jeune fille ordinaire de ce pèlerinage, pas une folle dingo ni une illuminée. Sans tronquer ses propos, les interpréter, ni chercher à la piéger. Quel exploit. On nous les a changés ! Si ce n’est pas un miracle…

 

Il est vrai que ces jeunes – France Inter rappelle que 50 % d’entre eux ont moins de vingt ans – constituent un phénomène de société : on nous bassine depuis des mois avec les black-blocs et le soulèvement de la terre. Ils sont les anti black blocs et le soulèvement vers le Ciel. Les uns sont nihilistes et crient « Ni Dieu ni Maître », les autres sont gonflés d’espérance et se mettent à genoux. Les uns rêvent du grand soir, les autres du petit matin, quand ayant rangé leur tente, ils reprennent la route là où ils l’ont laissée la veille, bannières au vent. Les uns réclament le droit à la paresse, les autres recherchent la rudesse, celle de la route. Les uns pensent à leur avenir matériel, leur retraite, les autres à leur destin spirituel… après la retraite. Les uns vocifèrent des slogans, les autres chantent des cantiques. Les uns détruisent sur leur passage. Les autres ramassent jusqu’au dernier papier gras, seuls, les lieux de bivouacs, martelés comme après le passage d’un troupeau, se souviennent des milliers de godillots. Les uns marchent pour le climat, les autres marchent malgré la météo : l’an passé, pluie diluvienne ! Apparemment elle ne les a pas dégoûtés.

Les uns ne veulent pas d’enfants, les autres se rencontrent (parfois) au pèlerinage et reviennent des années plus tard, avec leur nombreuse progéniture. Les uns veulent faire du passé table rase, les autres veulent tout conserver. Trop, peut-être, de l’avis de certains. Car s’il est de nombreux pèlerinage menant à Chartres chaque année, celui de la Pentecôte a une spécificité : son rite. Chacun l’appelle comme il veut : tridentin, de Saint-Pie V, traditionnel, en latin, ou, comme Benoît XVI, « extraordinaire »…
Au-delà de la jeunesse, France Inter souligne la progression impressionnante des effectifs. 16.000 pèlerins. Anticipant une croissance de 10 %, afin de respecter les autorisations administratives et devant l’impossibilité de gérer une telle colonne sur la route et dans les bivouacs, l’organisation a dû fermer les inscriptions, il y a une semaine. Et c’est encore sans compter, les pèlerins « d’en face », ceux de la Fraternité Saint-Pie X, eux aussi attachés au rite tridentin, qui, le même week-end, font le chemin inverse. Ils ont à ce jour près de 5.300 inscrits (6.000 attendus lundi à l’arrivée à Paris).

Si même France Inter parvient à surmonter ses préventions pour s’intéresser à cette foule fervente, les évêques français devraient  pouvoir, aussi, y arriver ?
Dans un article récent publié dans La Croix, l’historien des religions Guillaume Cuchet tire la sonnette d’alarme : « Le catholicisme risque de ne plus rester longtemps la première religion ». Il s’appuie sur l’Enquête Trajectoire et origines de l’INSEE paru en avril, qui constate notamment que si l’islam, de toutes les religions, est celle qui chez nous a le meilleur taux de transmission, le catholicisme est à l’inverse, sur ce plan, la moins bien lotie. Guillaume Cuchet ne s’explique pas que ce « déclassement annoncé » suscite si peu de commentaires dans l’Église, « comme si les évêques sonnés par la crise des abus sexuels, ne savaient plus qu’assister, muets et impuissants à l’effondrement ». Peuvent-ils continuer de s’offrir le luxe de repousser ces ouailles ? Et de ne pas vouloir réfléchir aux raisons de cet enthousiasme ?

Mais l’autre élément marquant ce cette édition, qui lui n’a pas été abordé par France Inter, dépasse nos frontières : le pèlerinage de Chartres essaime. Après l’Argentine et l’Australie, c’est d’Espagne et des États-Unis que viendront des équipes logistiques organisant des pèlerinages  jumeaux, initiés en 2021. Elles comptent ainsi apprendre in situ à gérer des groupes de grande ampleur.

Il y a quelques jours, encore, le pape François dénonçait en Hongrie le danger du « restaurationnisme », de « l’arriérisme » et de la « maladie nostalgique ». Mais comment des jeunes nés quarante ans après Vatican II pourraient-ils se sentir visés par ces mots ? Peut-être vivrons-nous assez vieux, qui sait, pour voir un jour le motu proprio Digitum in oculo :  nous nous sommes fourrés le doigt dans le l’œil ! Dans les fidèles de la messe tridentine, nous avons cru voir un EHPAD, c’était en fait une pouponnière. Et après tout, si ces bambins sont loin d’être parfaits, ils ne font pas, in fine, de si mauvais catholiques. Par les temps qui courent, on ne peut pas se permettre de faire la fine bouche.

Gabrielle Cluzel

 Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste
( 25 mai, 2023 )

LE COUP DE POING DE PÉRONCEL-HUGOZ CONTRE LES DÉTRACTEURS DU GOUVERNEMENT SYRIEN

 

Lu sur « Je Suis Français »

 

Soutenu par son solide allié russe, le régime Assad, en place à Damas depuis 1970, est venu à bout de la majorité de son opposition  interne et du coup, mi-mai, il a été réintégré sans conditions dans la Ligue arabe d’où ses féroces ennemis sunnites l’avaient chassé il y a 12 ans…

La France, ancienne puissance mandataire au Levant (Syrie et Liban), entre les deux guerres mondiales, conserve, elle, pour le moment, des relations glaciales avec Damas, entichés que sont nos dirigeants d’idées « démocratiques », totalement impossibles à appliquer dans la géhenne orientale..

LE COUP DE POING DE PÉRONCEL-HUGOZ CONTRE LES DÉTRACTEURS DU GOUVERNEMENT SYRIEN  dans actualités le-president-syrien-avait-recu-la-legion-d-honneur-par-le-president-jacques-chirac-en-2001-peu-apres-avoir-succede-a-son-pere-hafez-al-assad-a-la-tete-du-pays-photo-patri

Ce ne fut pas toujours le cas : lors du 14-juillet 2oo8, le président Bachar el Assad et son épouse furent invités par le président Sarkozy à assister au défilé national, et dès 2001 le président Chirac avait nommé son jeune collègue syrien grand-croix de la Légion d’honneur, décoration qu’il devait renvoyer à Paris après les propos insensés du politicien Laurent Fabius sur le « bon boulot » accompli au Levant par les djihadiste…

Une minorité cruellement persécutée 

Les rapports entre la France et la minorité musulmane alaouite,  à laquelle appartient la famille Assad, étaient pourtant anciennes et de qualité. Les Français, lors de leur mission mandataire au Levant, avaient vite saisi le mépris insondable des sunnites majoritaires envers la minorité alaouite (12 p 100 de la population syrienne totale), et les massacres voire la mise en esclavage que ce mépris de fer avait entrainés durant un millénaire.

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Les alaouites*, un peu comme les druzes, les boharas ou les ismaéliens, forment une de ces sectes  « aberrantes », issues pour des raisons souvent obscures de l’islam originel et qui ont forgé leur pugnacité en luttant contre la violente intolérance des sunnites majoritaires. Afin d’essayer de corriger un peu cette injustice historique, les Français créèrent en 1922 dans la région côtière de Lattaquié (antique Laodicée), où les alaouites étaient alors considérés  comme  majoritaires, un « État des alaouites » ; le 15 juin 1936, les principaux notables alaouites, dont Soliman el Assad, ancêtre direct des deux présidents syriens de ce nom, satisfaits de leur petit État autonome mais redoutant que Paris, sous pression du conformisme international, n’évolue vers une indépendance unitaire syrienne, écrivirent a León Blum, alors président du Conseil des ministres français, qu’ils craignaient que les minoritaires ne soient derechef à tout le moins discriminés ; ce qui plus tard évidemment ne manqua point d’arriver…

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Cette missive historique capitale fut redécouverte dans les archives du Quai d’Orsay, à la fin du XXème siècle, par un duo de chercheurs franco-libanais, A. Laurent et A. Basbous, co-auteurs de « Guerres secrètes au Liban » (Gallimard, 1987).

« Saignés comme des moutons »

Afin de résister à une pression sunnite inouïe, la dictature alaouite instaurée en 1970 fut et reste impitoyable. Les sunnites sont sous surveillance permanente même si certains se sont plus ou moins ralliés par intérêt au régime Assad, dont le chef actuel Bachar (né en 1965) a en outre épousé une sunnite syrienne. Cependant la communauté d’origine de Madame Assad n’a nullement renoncé à reprendre le pouvoir et à se venger de ses anciens vassaux ou serviteurs alaouites qui, tôt ou tard, dit-on au Proche-Orient, « seront saignes comme des moutons« … Ces minoritaires islamoïdes, plus ou moins appuyés par les chrétiens syriens, vivant eux aussi depuis des siècles dans la crainte des exactions sunnites, se battent donc dos au mur ; ils jouent leur vie et leur avenir au quotidien. C’est la règle orientale du « je te tue sinon je sais que tu vas me tuer« …

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Ce qui a changé, c’est que maintenant Bachar el Assad a pour ferme allié Moscou. Et aussi l’Iran chiite qui vomit les sunnites malgré des « baisers Lamourette » qui ne sont que des pauses dans cette haine intermahométane dont nous n’avons pas idée en Occident. Il faut préciser que les Syriens alaouites ont su séduire les Persans en ravivant leurs quelques liens religieux ancestraux et obtenir ainsi leur précieux et triple appui militaire, économique et politique. Ce qui ne devrait en rien nous choquer, au contraire, nous Français qui n’avons guère eu à nous louer de nos relations avec les sunnites lesquels ne nous ont jamais fait de cadeaux… Voir entre autres l’ingratissime Algérie…    ■

* La communauté alaouite de Syrie et la dynastie alaouite du Maroc n’ont rien en commun si ce n’est un lien historique mais non idéologique avec le calife Ali, cousin, gendre et un des  successeurs du prophète Mahomet. Les Alaouites du Maroc sont d’ailleurs clairement sunnites.

Bibliographie : « Assad » par notre confrère Régis Le Sommier qui a rencontré plusieurs fois Bachar el Assad et connaît concrètement le tragique théâtre syrien. Il en a tiré un petit essai enlevé qui éclaire un peu la personnalité pour le moins énigmatique de l’actuel chef de l’État syrien. Editions la Martinière, 2018.


Longtemps correspondant du Monde dans l’aire arabe, Péroncel-Hugoz a publié plusieurs essais sur l’Islam ; il a travaillé pour l’édition et la presse francophones au Royaume chérifien. Les lecteurs de JSF ont pu lire de nombreux extraits inédits de son Journal du Maroc et ailleurs. De nombreuses autres contributions, toujours passionnantes, dans JSF.

( 23 mai, 2023 )

Agression de Jean Baptiste Trogneux, la violence est partout

 

Lu sur « actionfrancaise.net »

 

L’affaire de l’agression lâche et sauvage du neveu de Brigitte Macron, outre qu’elle nous répugne et que nous condamnons sans la moindre réserve ses tristes et pitoyables auteurs, est révélatrice d’un climat de violence qui se répand dangereusement dans notre société.

Récemment le ministre de l’Intérieur a été ému par les slogans anti-républicains scandés par nos militants lors du cortège en hommage à Jeanne d’Arc dimanche dernier. Oui, en effet les royalistes sont pour la plupart anti-républicains, et plus particulièrement hostiles à cette république élevée comme une sorte de divinité théorique au-dessus des Français. Cette même république a puisé sa légitimité dans un carnage sanguinaire dont, non seulement la famille royale fut la victime, mais des centaines de milliers de Français de tous âges et de toutes conditions, femmes et enfants compris. C’est strictement historique et incontestable malgré les dénégations ou les tentatives de justification des descendants idéologiques des bourreaux de la révolution.

La violence est dans notre hymne national qui parle du sang impur qui doit abreuver nos sillons, alors que ceux de nos voisins de la vieille Europe évoquent leurs racines et leurs ancêtres. Elle est aujourd’hui le fait de nos chefs d’État qui se succèdent depuis quelques décennies et se conduisent comme de nouveaux riches appuyant sur tous les boutons du pouvoir, le jouet dont ils rêvaient pour couronner leurs carrières et qu’ils ont acquis à la force du poignet dans d’interminables marathons électoraux. Et comme ils sont redevables de soutiens financiers qui leurs ont été généreusement attribués, ils doivent mettre en place la casse sociale qui leur est impérativement commandée par Bruxelles et le marché.

Quand la révolte éclate (bonnets rouges, gilets jaunes…), des centaines de nervis casqués et masqués s’appliquent à pourrir le mouvement en transformant la protestation sociale en guerre de rue. La violence est aussi dans un pays où la justice s’évertue à acquitter les incendiaires, les délinquants et les assassins potentiels de policiers, aussi bien qu’elle condamne durement ceux qui maitrisent des cambrioleurs dans un geste de légitime défense. La violence est partout et il est assez facile d’en identifier les causes visibles : Destruction des familles, de l’éducation, développement de la toxicomanie et de l’usage des antidépresseurs, disparition des classes moyennes, précarisation de la population étudiante et professionnelle, appauvrissement des plus pauvres et enrichissement des plus riches, immigration invasive totalement incontrôlée pulvérisant ce qui restait du lien social, émergence des théories de transformation de l’humain, du genre, de la sexualité et de la natalité, de la fin de vie, ainsi que du retour fracassant des races qu’on croyait avoir scientifiquement évacuées.

Tout cela accouche de nouvelles communautés qui exigent réparations car se plaçant toutes dans la posture de victimes opprimées. Comme notre nouvelle société liquide ne veut considérer que l’individu, vieille rengaine rousseauiste « reformatée », nous entrons dans l’ère post moderne du « tous contre tous ». Nous sommes d’autant plus solidaires du jeune Jean Baptiste Trogneux, que nos jeunes militants font souvent aussi l’objet de lynchages surprises, pour lesquels toutes les plaintes déposées sont restées jusqu’à ce jour sans suites.

C’est pourquoi nous disons au président, son épouse, et toute la famille éprouvée par ce déchainement de haine à quel point nous les comprenons et les assurons de notre totale compassion.

Olivier Perceval

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